5 questions à Camille Babeau, directrice littéraire du département Documentaires

Du choix des thématiques à la représentation des personnages, l’éditrice Camille Babeau partage sa vision d’un secteur en constante évolution et les enjeux qui guideront ses prochaines parutions.


En dix ans, comment avez-vous vu évoluer le documentaire jeunesse, à la fois dans le fond et dans la forme ?

Le doc jeunesse est une catégorie de livres qui suit de très près les sensibilités et tensions de la société. En dix ans, beaucoup de choses ont évolué, et positivement. Nous qui publions beaucoup de titres sur la nature, nous n’en parlons plus pareil, désormais : nous incluons l’humain comme faisant partie de la nature et appuyons sur notre dépendance vis-à-vis du vivant. On incite l’enfant à observer son propre environnement en privilégiant les sujets de proximité, on veille à ne pas « chosifier » le vivant.

Et puis l’importance de la représentation de role-models pour nos lecteurs et lectrices implique que nous pensions davantage à qui nous mettons en scène dans nos livres, tout cela est moins laissé au hasard qu’auparavant. Nos briefs de personnages sont très précis. En réunions édito, on se questionne beaucoup sur nos biais, on élargit parfois le cercle de décision pour recueillir le maximum de perceptions et éviter les déséquilibres ou des maladresses dans nos représentations.
 

Documentaires


Nous rééditons et modifions à tour de bras notre fonds documentaire à l’aune de ces problématiques, c’est à la fois passionnant et une mission sans fin !

Quant à la forme, je dirais que ce qui l’impacte le plus est une montée en compétence de notre lectorat. Les enfants sont très tôt très connaisseurs de leurs sujets passion : stimulés tout petits par une belle offre culturelle et entourés d’écrans, ils sont devenus peut-être plus exigeants sur la représentation du réel. C’est aussi pour cette raison que nous avons de nouvelles collections de documentaires photos.

Comment définissez-vous la ligne éditoriale du département Documentaires chez Milan ?

Curieuse, ouverte, éclectique, audacieuse, sensible, on est partout : dans tous les rayons et sous-rayons du doc et des autres segments du marché du livre. Nos livres s’invitent même ailleurs que dans les librairies ! On pousse les contours du genre… L’idée est d’outiller autant que possible les enfants et de nourrir tous les centres d’intérêt.

Comment parvenez-vous à rester en phase avec les questions de société et les attentes des enfants d’aujourd’hui ?

Le métier d’éditrice chez Milan implique d’être très connectée à l’info, aux médias en général, d’être curieuse des études qui paraissent, des succès sur les plateformes, des tendances sur les réseaux… Nous avons la chance d’avoir une solide documentaliste qui alimente ses besoins et cette veille.

On est particulièrement attentifs aux retours des lecteurs et lectrices, qu’ils soient reçus directement, lors de rencontres dans des classes, ou par mail. On est très liés à notre équipe de diffusion et aux libraires et bibliothécaires, qui sont les premiers à compiler des retours terrain qualitatifs et quantitatifs. Et puis nous restons connectés aux enseignants, qui connaissent si bien la jeunesse.

Enfin, nous faisons relire par des spécialistes de nos sujets le plus souvent possible, collaborons avec des pédiatres et psychologues et, quand cela est approprié, à des relecteurs et relectrices sensibles qui nous aident à nous resituer et à être les plus justes dans nos propos.

Quels vont être les grands enjeux éditoriaux de demain dans ce secteur ?

Que la lecture reste désirable et une source de joie pour les enfants et leurs parents, mais qu’elle demeure aussi une nécessité à leurs yeux, malgré la concurrence des écrans et les turbulences économiques des foyers. Les adultes doivent pouvoir compter sur nos livres pour documenter sérieusement les enfants mais aussi les divertir et les passionner, répondre de façon responsable à leurs questions. La force d’un groupe comme Bayard permet une diffusion de nos contenus en audio, numérique, en version animée… pour toucher les enfants là où ils sont. Mais l’acte de lecture et le rapport au livre papier ont un impact inégalable dans le développement des enfants, qu’il faut défendre et encourager.

Quelles sont vos nouveautés coups de cœur de cet automne 2025 ?


La collection « Ma journée » : des imagiers photos pour les tout-petits, parfaits pour travailler l’identification et la projection, quand l’enfant commence à mettre les mots sur son quotidien, avec les magnifiques images de Géraldine Aresteanu.

C’est quoi, le handicap ? à mettre entre les mains de TOUS les enfants dès 10 ans, pour les sensibiliser aux enjeux de notre société.

Vis ma vie de renard : pour son titre, déjà ! Et parce que le lecteur est invité à s’identifier à un animal, et à quitter son point de vue humain. Le livre est accompagné d’une fiche pédagogique mise à disposition des enseignants.

Collection Ma journée

C’est mon cerveau ! parce qu’Élise Gravel est brillantissime dans ses adresses aux enfants !

Je fais du breaking avec Syssy, pour l’inspiration et l’admiration que Sya Dembélé suscite et parce que c’est une joyeuse discipline accessible à tous et toutes.